La vie !


Une phrase me frappa à jamais : « La vie ne vaut d’être vécue qu’au bord de la folie ». Je me souviens qu’une exaltation farouche gonflait mon cœur à mesure que je lisais et relisais cette phrase dans ma chambre, et qu’il me semblait qu’elle illuminait tout ce que j’avais ressenti jusqu’alors. Aujourd’hui encore, je suis frappé de constater que nulles ténèbres n’avaient jamais surgi d’une flamme aussi vive.

Thomas H. Cook

La vie amoureuse


Je n’ai plus envie de fréquenter qui que ce soit. Tout ça pour découvrir ensuite un type qui se révélera un invalide des sentiments, un raté des émotions ou un incompétent de la vie amoureuse, comme la plupart de ses semblables. C’est bon, ils ne valent pas tout le mal qu’on se donne pour eux.

Agnès Abécassis

Des choses graves


Cessez de sourire devant vos écrans, je vous parle de choses graves. Je vous parle de l’avenir de l’humanité. Cela ne pourra plus durer. Ce mode de vie n’a pas de sens. Nous gaspillons tout, nous détruisons tout. Les forêts sont laminées pour faire des mouchoirs jetables. Tout est devenu jetable : les couverts, les stylos, les vêtements, les appareils photo, les voitures, et sans vous en apercevoir vous devenez vous aussi jetables. Renoncez à ce genre de vie superficielle. Vous devez y renoncer aujourd’hui, avant qu’on ne vous force à y renoncer demain.

Bernard Werber

Cette vie humaine


C’est inexplicable cette vie humaine. Personne n’a de vie en soi ; on vit toujours pour quelqu’un d’autre. Regarde cette fleur sauvage qui ne porte même pas de nom. Comme elle est pleinement elle-même, sous prétexte de l’aimer, je la cueille, et je mets fin à son destin. Ainsi sur cette terre, sous ce ciel, quelqu’un vit innocemment sa vie ; d’autres, s’accordant des droits sur lui, font négligemment un geste pour l’interrompre, avant de disparaître un jour eux-mêmes, sans que personne ait jamais su pourquoi. Oui, pourquoi ?

François Cheng

Les ronces de la vie


Les portes sont grandes ouvertes à ceux qui font choix de chercher à se connaître. Mais passé le seuil, le parcours devient périlleux, miné de toutes ces choses que nous refusons de croire, de nos blessures qui grondent à l’unisson. Les ronces de la vie laissent des cicatrices que nous ne voulons pas voir.

Patrice Trigano

Sa vie dans les livres


Parce qu’elle avait passé sa vie dans les livres, elle ne se forgeait plus d’illusions sur eux, elle savait que les livres mentent, crient, se contredisent ; ils ont la bouche sale, les livres, ils ont trop mangé, trop vomi, trop mâché, trop régurgité, trop baisé, trop étreint. Quand elle entrouvrait un volume, elle en trouvait désormais l’odeur nauséabonde. 

Eric-Emmanuel Schmitt

Ma vie est ma vie


Toute ma vie, j’ai eu plusieurs fois par jour le sentiment que ma vie était magnifique ou bien lamentable. Et que le verdict viendrait, peut-être bientôt, d’un virage décisif ou d’un point final qui forcerait la balance d’un côté ou de l’autre. Mais le grand âge m’apprend ceci : ma vie n’est pas magnifique ou lamentable, elle est les deux à la fois. Elle a deux lectures possibles, et encore bien d’autres. Ma vie est ma vie, une suite de moments en tout genre, et je peux la voir à la Houellebecq, à la Walt Disney, à la Victor Hugo, à la Woody Allen… il ne tient qu’à moi.

Elisa Brune

Le chemin parcouru


Quand nous sommes enfants, puis adolescents, nous ne nous intéressons pas de près à ceux qui nous ont précédés. Nous avons bien trop soif d’immédiat et de sensations nouvelles. Nous avons le désir de découvrir le monde comme personne avant nous n’a su le faire. Il sera bien temps, plus tard – si nous vivons – de nous retourner. Je ne crois pas qu’on se met à penser au passé (a retourner aux sources) après la quarantaine parce qu’on est sur la « pente descendante ». Je crois plutôt que la vie est comme l’univers : elle se dilate, puis se contracte, alternativement. Je crois, aussi que retourner sur ses pas (sur les pas des prédécesseurs) n’est pas une manière de cultiver la nostalgie, mais de donner sens au chemin que nous avons, après eux, parcouru.

Martin Winckler

Une vie meilleure


Je m’aperçois que la vie que j’aurais aimée n’est pas possible, elle aurait mal fini de toute façon, ça ne sert à rien de s’inventer des histoires, ça ne sert à rien de penser à hier, de regretter, d’imaginer demain aussi, ça ne sert à rien, à rien, à rien du tout, ça ne me fait pas même du bien, je gagne du temps, je le sais, à rêver, à imaginer une vie meilleure, je gagne du temps, je grignote ce qui reste à grignoter, je prends à la vie ce qui me reste à prendre, je picore les miettes dans une assiette vide, j’espère, mais dans le fond… […] À quoi bon alors, à quoi bon dites-moi…

Serge Perez